La marque employeur, ça n’existe pas!

On parle beaucoup, et de plus en plus, de marque employeur. Il me semble pourtant que nous commettons une erreur de langage, car il n’y a qu’une marque pour l’entreprise. Ne devrions-nous pas plutôt parler d’attractivité employeur, de stratégie ou de communication employeur ? Ce qui est certain, c’est que je mets quiconque au défi de me présenter une marque employeur, et tant qu’il ne sera pas possible de le faire, nous pourrons affirmer que la marque employeur : ça n’existe pas !

On parle de marque employeur, quand l’entreprise décide de s’adresser à la cible des futurs collaborateurs et futures collaboratrices de l’entreprise, aussi parfois, dans le même temps, aux équipes internes, que nous aurions parfois tendance à oublier, peut-être même à négliger. En réalité, l’entreprise parle de sa marque sous un angle employeur. Elle exprime ses positions d’employeur, un discours employeur…mais toujours au service d’une seule et même marque.

La marque a plusieurs facettes

Celles et ceux qui me disputent cette analyse souvent se contredisent, en expliquant qu’il y aurait bien plusieurs marques, car la marque aurait plusieurs facettes (corporate, business, employeur…). Mais plusieurs facettes d’une marque ne constituent pas plusieurs marques. Pas plus que les facettes d’un diamant constitueraient plusieurs pierres précieuses. Ainsi reconnaissent-ils dans leur propre argumentation qu’il n’y a qu’une marque, …qui doit se travailler sous des angles différents en fonction des cibles. C’est exactement ce que je dis !

D’autres encore expliquent que dans une dynamique d’attractivité employeur, la communication n’intervient que dans un second temps, après un travail de marketing RH. Si c’était le cas, il appartiendrait alors au marketing de faire son travail de… marketing. Mais là, c’est moi qui ne suis pas à l’aise avec le principe selon lequel le marketing ne s’appliquerait pas uniquement aux produits et aux services, mais aussi à l’humain, considéré alors comme une marchandise. Etudier ou analyser les souhaits des candidats, leurs besoins, leurs motivations est un travail à faire par les RH. Cela n’est pas du marketing en tant que tel !

Satisfaire les besoins de recrutements

Revenons à l’essentiel : à quels besoins doit répondre la communication employeur ? À ceux de l’entreprise de séduire et attirer les compétences et les talents nécessaires à son fonctionnement et à son développement. S’agit-il d’un travail de ressources humaines ou de communication ? Assurément de communication, puisqu’il est question de promouvoir l’entreprise et ses atouts. L’intention de communication est de satisfaire les besoins de recrutements, coordonnés et contrôlés par les RH, mais il s’agit bien d’une prise de parole publique de l’entreprise, donc de communication !

Il est aussi éventuellement possible de mettre en avant les politiques RH, quand elles existent d’une part, et que d’autre part, elles représentent un véritable atout différenciant pour valoriser l’entreprise et ainsi attirer des candidats intéressants. Cela reste bien un travail de communicant(e). Enfin, s’il s’agit d’accompagner les recruteurs dans des salons, c’est là aussi une mise en scène de la marque, une présentation de l’entreprise, de ses missions, de ses valeurs, de ses ambitions… De qui cela pourrait être la fonction, l’expertise et la responsabilité, si ce n’est de la communication ?

Comme on ne parle pas de marque employés mais de communication interne, de marque événementielle mais de communication événementielle, de marque financière, mais de communication financière, nous ne devons donc pas parler de marque employeur, mais bien de communication employeur ou de recrutement. Les mots ont un sens. Une marque est une marque.

Reconnaître à la communication son aire d’expertise et son cadre de responsabilité est tout aussi important que la reconnaissance à apporter au professionnalisme des ressources humaines. Dans les réactions à ma tribune, une des plus partagée sur les réseaux sociaux, « La communication est-elle un vrai métier ? », ce sont les professionnels des RH qui interviennent le plus souvent, après les premiers concernés, pour me dire que le même argumentaire pourrait s’appliquer aux fonctions RH, parfois ou encore trop peu considérées à leur juste valeur. Je ne peux que les comprendre et les soutenir. Mais ne faisons pas exercer aux RH un métier de communication, qui n’est justement pas le leur ?

Il n’y a pas d’exception pour la communication employeur

Cette tribune me permet aussi de m’adresser à certain(e)s prétendu(e)s expert(e)s RH et idéologues en chambre, assurément plus théoricien(ne)s que praticien(ne)s, plus donneurs et donneuses de leçons qu’acteurs et actrices expérimenté(e)s : il n’y a dans mes propos aucune intention d’ouvrir ou rouvrir un débat sur des guerres anciennes de territoires supposées entre RH et communication. D’ailleurs, ces oppositions dépassées n’existent que si l’une des deux fonctions ne respecte pas l’autre, situation que je n’ai jamais eu à vivre dans les six grands groupes dans lesquels j’ai exercé. Ce qui ne veut pas dire que cela n’existe pas.

Mon propos se limite à bien (re)positionner les compétences de la communication, dont le métier est… la communication, partenaire au quotidien de l’ensemble des autres directions de l’entreprise, dont des ressources humaines, un de ses contributeurs et partenaires incontournables. C’est à la fois une question de bon sens et de professionnalisme, notamment du fait de la porosité des communications entre les différentes cibles de la marque, qui est une et unique !

Frédéric Fougerat (@fredfougerat pour les tweetos) est président de Tenkan Paris, agence conseil en communication de crise, image et réputation de personnalités sensibles, et cofondateur-associé de Cogiteurs, agence conseil en communication corporate, collectif de DirComs au service des DirComs.

Il a dirigé la communication de collectivités publiques durant 15 ans, et la communication de grands groupes internationaux pendant 20 ans (SBF 120, LBO…).

Le magazine Forbes l’a classé en 2021, n°1 de son top 100 des décideurs les plus influents de la communication en France. Frédéric Fougerat est officier de l’ordre national du Mérite, chevalier du Mérite agricole, et chevalier des Arts et des Lettres.

Il est l’auteur de livres sur le management «Un manager au cœur de l’entreprise» et «Le Goût des autres, mes recettes de manager», et sur la communication «Un DirCom n’est pas un démocrate», «La Com est un métier», et «Le dico de la Com» aux éditions Bréal Studyrama.

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